Le quiet quitting, ou la démission silencieuse, a fait couler beaucoup d’encre cette année. Selon une étude de l’Ifop, 37% des actifs français affirment ne faire que le strict minimum au travail. Si un certain désengagement commence à se faire sentir parmi vos collaborateurs, il est temps de mettre en place un baromètre QVT. Suivez le guide.
Pourquoi mettre en place un baromètre QVT ?
Si le désengagement au travail inquiète les entreprises, c’est parce qu’il a un coût. En moyenne, 15 000 euros par an et par salarié. Le prix à payer d’une mauvaise qualité de vie au travail est d’ailleurs collectif. C’est toute la collectivité qui assume la prise en charge des burn-out, dont le nombre a augmenté de 25% par rapport à mai 2021. Car en bout de chaîne, bien sûr, c’est le salarié qui fait les frais de mauvaises conditions ou de relations de travail toxiques.
D’après l’étude Gallup 2022, on constate que le stress chez les salariés a « atteint un niveau record» cette année, plus élevé qu’en plein Covid. Au contraire, une bonne qualité de vie au travail génère de l’engagement :
- 60 % des collaborateurs se sentent plus motivés quand l’employeur prend en considération leur bien-être au travail selon une étude de la fondation Mind au Royaume-Uni.
- 46% souhaitent travailler dans une organisation qui garantit leur “bien-être mental et physique” (étude Gallup Organization).
- 61% des salariés déclarent qu’ils considèrent plus important le bonheur et le bien-être au travail que le salaire selon une étude Wildgoose.
Les salariés heureux seraient plus productifs selon d’autres études. Que le bonheur soit rentable ou non, prendre soin de la santé et du bien-être des salariés est de toute façon une obligation légale de l’employeur. Car contrairement au bonheur au travail, qui est un concept un peu flou, la QVT est encadrée et se mesure.
QVT : plus que le bien-être au travail, la capacité d’agir sur le travail
La notion de Qualité de Vie au travail fait son apparition dans les années 50 et elle est à cette époque très liée aux conditions de travail. C’est seulement en 2013 que le concept de QVT prend véritablement corps avec la signature du premier accord National Interprofessionnel (ANI) . Dès 2013, la question du sens et de l’empowerment au travail est au cœur de la définition même de la QVT.
La notion de bonheur au travail est plus récente. Avec l’appui du Chief Happiness Officier (CHO), les entreprises cherchent à agir sur la perception du bien-être des salariés. Mais bien souvent, la capacité d’action du CHO est limitée à l’environnement de travail. Les démarches sont centrées sur le cadre et les “petits plus”.
Quant au bien-être au travail, il est défini par l’OMS comme étant « un état d’esprit caractérisé par une harmonie satisfaisante entre d’un côté les aptitudes, les besoins et les aspirations du travailleur et de l’autre les contraintes et les possibilités du milieu du travail.» Il reste donc aussi très lié au contexte, plus qu’au contenu du travail.
En décembre 2020, un nouvel accord interprofessionnel signe l’avènement de la QVT. L’objectif est de réaffirmer que la qualité de vie au travail, ce sont d’abord des conditions de travail qui permettent aux salariés d’agir collectivement sur leur propre activité.
La QVT n’est donc pas qu’une question d’environnement de travail, c’est d’abord une histoire de participation. Alors comment la mesurer ?
Le diagnostic QVT : comment mesurer et évaluer la qualité de vie au travail ?
Selon l’ANACT (l’Agence Nationale pour l’Amélioration des Conditions de Travail), il existe 6 facteurs clés de la QVT.
Les six facteurs de la QVCT selon l’ANACT
- La qualité des relations sociales et professionnelles : cela désigne par exemple le type de management, les interactions dans l’entreprise, la qualité des relations avec les collègues, etc.
- Le contenu du travail : la variété des tâches, l’autonomie, la capacité à faire un travail de qualité (outils à disposition, etc.), mais aussi la clarté des objectifs à atteindre et de modalités d’évaluation de la performance.
- L’environnement de travail : l’aménagement des postes et des horaires, la politique de télétravail, mais aussi les services proposés aux salariés, l’environnement du salarié (bruit, espace, température ou encore lieu), etc.
- Le management et le partage de la stratégie : la transparence, la clarté des rôles, l’information sur la politique de l’entreprise, l’accompagnement du changement, etc..
- Le développement des compétences : existence d’un parcours d’intégration, plan de formation, politique et outils de gestion des compétences
- L’équilibre professionnel et l’égalité des chances : équilibre vie privée / vie professionnelle, diversité, non-discrimination, égalité professionnelle, égalité homme / femme, etc.
Quels outils et grilles de références pour mesurer le bien-être des salariés ?
Il existe plusieurs manières de mesurer la Qualité de Vie au Travail, l’idéal étant de les combiner pour avoir une vision à 360° des différents facteurs de QVT. En revanche, ce n’est pas toujours possible : ces démarches sont chronophages, et leur externalisation à un coût. Avant de choisir une démarche d’enquête plutôt qu’une autre, il est donc essentiel d’anticiper la nature des informations qui seront collectées, et les avantages et limites de chaque outil de collecte et d’analyse.
Voici les principaux outils possibles pour alimenter le diagnostic :
Outils et modalités | Type d’informations collectées | Avantages | Limites |
---|---|---|---|
Analyse des données sociales et RH | Turn-over, données démographiques, indicateurs d’égalité salariale, etc. | Accessibilité des données, démarche peu coûteuse | Fiabilité des données, taux de remplissage des SI, etc. |
Enquête par questionnaire (baromètre QVT) | Statistiques et verbatims sur la perception des salariés | Expression des salariés, démarche duplicable dans le temps | Interprétation des résultats |
Audit externe
(audit RPS) |
Observation et analyse du travail, entretiens qualitatifs | Analyse en profondeur | Dépendance vis-à-vis d’un expert externe |
Inventaire des pratiques | Inventaire de ce qui existe et des bonnes pratiques | Valorise et optimise l’existant | Ne porte pas sur le contenu ou l’organisation du travail |
Si vous optez pour une enquête par questionnaire, voici ce qu’il faut retenir.
Comment déployer une enquête sur la Qualité de Vie (baromètre QVT) ?
Au démarrage d’une enquête sur la qualité de vie au travail, deux options sont possibles :
- S’appuyer sur des référentiels existants des baromètres QVT “prêt-à-l’emploi”
- Créer son propre sondage en interne
Chaque approche a ses avantages, la première permet de pouvoir se comparer plus facilement avec d’autres entreprises, et parfois d’obtenir un label ou une reconnaissance. La seconde offre l’opportunité de réfléchir à ses spécificités et aux messages que souhaite porter l’entreprise sur ces questions.
4 grands types d’outils et baromètres QVT sur étagère
La fabrique Spinoza a réalisé un guide pratique des outils de mesure de la qualité de vie au travail. Parmi les principaux outils, on peut distinguer :
- Les outils inspirés de la Santé au Travail, tels que l’indice de Bien-être au Travail de Mozart Consulting, ou la Mesure Management Santé proposé par Malakoff-Médéric.
- Les outils de type audit social, comme l’Européan Social Label qui décerne un label selon le score obtenu à un questionnaire très orienté sur les relations de travail, les conditions de travail ou encore la perception de l’avenir, ou encore le sociodiag.
- Les outils orientés vers la mesure du bien-être, tels que le baromètre du Bien-Etre au Travail développé par Charles Martin-Krumm.
- Les outils orientés autour de l’analyse de la perception et des retours du terrain, tels que le trust index de Great Place To Work.
Le sondage personnalisé pour mesurer le bien-être de ses collaborateurs
Un baromètre QVT se présente sous la forme d’une enquête par questionnaire auprès des salariés. La perception des collaborateurs doit être croisée avec différentes variables : postes, métiers, environnements de travail, genre, ancienneté, etc. Avant de partir dans la construction d’un outil en interne, la fabrique Sinoza propose de se poser plusieurs questions préalables.
- Quels sont les principaux objectifs de l’entreprise (diminuer les RPS, améliorer la motivation, diminuer l’absentéisme, etc. .) ?
- Quel est le budget ?
- Quels sont les domaines qui sont à creuser (par exemple, les facteurs de motivation, ou les contraintes personnelles et l’équilibre vie pro-vie privée).
- L’analyse sera-t-elle qualitative (perception) ou quantitative (indicateurs objectifs) ?
- Les mesures du bien-être permettent-elles de se comparer à d’autres entreprises ?
- Enfin, les mesures sont-elles reproductibles dans le temps ?
En effet, le sondage d’opinion des salariés doit être un véritable outil de suivi. Comme tout baromètre, tout l’intérêt réside dans la mesure des évolutions d’une année sur l’autre, voire plusieurs fois par an. Et surtout, il faut bien réfléchir en amont à la formulation des questions, la pondération des réponses et les modalités d’exploitation.
L’enquête pulse, complémentaire pour alimenter le baromètre QVT en continu
En complément, il est aussi possible de réaliser de courtes enquêtes, qui prennent le poul des équipes à un instant T. C’est l’enquête pulse, connue aussi sous le nom d’enquête-éclair ou micro-enquêtes. Elles peuvent porter sur des sujets très divers, mais elles apporteront un complément d’information très riche sur le vécu du travail à distance, la satisfaction sur l’organisation des entretiens annuels, ou encore, la satisfaction des collaborateurs à un instant T. Plus ponctuelles et ciblées qu’un baromètre QVT, les enquêtes pulse sont aussi moins chronophages. Certaines entreprises les distribuent une fois par semaine, d’autres toutes les deux semaines ou une fois par mois. De manière générale, elles devraient être distribuées au moins une fois par mois, au minimum, pour être utiles.
Dans tous les cas, il est essentiel de se doter d’un outil de sondage adapté pour mesurer l’évolution dans le temps, créer et distribuer ses enquêtes plus facilement.